CP PRESENTE LES NOMINES POUR L’EDITION 2022/2023 DU « PENINSULA CLASSICS BEST OF THE BEST AWARD »

Traduction du discours de Christian Philippsen présentant les nominés au Quail Lodge à Carmel, CA (USA), le 13 aout 2023

Ce soir, je voudrais d'abord fêter un anniversaire. D'habitude, nous célébrons des chiffres ronds. Cette année, par exemple, nous avons eu le 50ème anniversaire de la Lancia Stratos, le 75ème anniversaire de Porsche, le 100ème anniversaire des 24 heures du Mans... Mais ce soir, je pense que le moment est bien choisi pour célébrer un 114ème anniversaire. En février 1909, Filippo Tommaso Marinetti publia le Manifeste du Futurisme dans le journal français Le Figaro. Il écrivit :

"Nous déclarons que la splendeur du monde s'est enrichie d'une nouvelle beauté : la beauté de la vitesse. Une voiture rugissante est plus belle que la Victoire de Samothrace (qui, comme vous le savez tous, est unu sculpture magistrale exposée au musée du Louvre à Paris)".

Et encore :

"Le moteur à combustion interne d'une voiture est divin. L'essence est divine..."

C'est ce genre d’engins que nous honorons ce soir, des voitures qui sont belles, des voitures que l'on peut écouter comme de la musique, des voitures que l'on peut respirer comme un parfum, des voitures que l'on peut ravitailler en quelques minutes, des voitures qui ont une âme, des voitures destinées à être conduites, des voitures pour les vrais hommes - et pour certaines femmes !

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Chers amis, bonsoir !

Avant d'aller plus loin, rappelons que le Peninsula Classics Best of the Best Award est décerné à une voiture qui a remporté le Best of Show dans l'un des plus grands concours au monde. Les candidats en lice pour le prix de ce soir sont les gagnants de 8 concours qui se sont déroulés en 2022 et qui viennent d'être présentés par Gordon.

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Depuis la création du BoB, les voitures de la collection de Peter et Merle Mullin, en Californie, ont été régulièrement nominées. Leur Talbot-Lago a remporté le tout premier BoB et la Bugatti Atlantic qu'ils partagent avec Rob Walton a remporté le troisième.

Cette année, leur coupé Dubonnet Xenia de 1938, présenté par "Merle on the Move", comme elle se surnomme elle-même, a remporté le Best of Show au concours Chantilly Arts & Elegance Richard Mille en France. Xenia est le nom de l'épouse décédée de Dubonnet et un concept de la Grèce antique évoquant le lien solennel entre l'hôte et l'invité. La voiture avait déjà été nominée pour le BoB en 2016. Comme je cherchais quelque chose de nouveau à dire à son sujet, j'ai demandé à ChatGPT une présentation d'une page. Ce que j'ai découvert était en effet totalement nouveau ! Je cite :

"La Dubonnet Xenia était basée sur un châssis Cadillac modifié (elle a un châssis Hispano Suiza modifié) et était équipée d'un moteur V8 (elle a en réalité un moteur 6 cylindres en ligne)."

ChatGPT continue :

"La voiture présentait un intérieur luxueux, d'inspiration Art déco, avec un bar intégré doté d'un shaker et de verres, et même une série de gadgets high-tech dont une radio et un téléphone" (ce que vous voyez est une photo de l'intérieur réel).

ChatGPT n'a rien dit sur le carrossier, qui était Saoutchik, de Paris, dont les tôliers ont donné vie à un dessin de l'aérodynamicien Jean Andreau, avec des vitres incurvées d'avant-garde, un pare-brise panoramique et des portes coulissantes.

La carrosserie française était à son apogée dans les années 1930, comme l’illustrent nos trois prochains candidats : une Delage, une Bugatti et une Duesenberg.

La Delage D8-120S de 1938 appartenant au Suisse Fritz Burkard a remporté le Best of Show au concours d'élégance qui s'est tenu au palais royal de Hampton Court.

Regardez ces ailes rivetées !

Louis Delâge a construit sa première voiture en 1905 et sa marque est devenue l'une des plus prestigieuses des automobiles françaises de l'entre-deux-guerres. Malheureusement, elle a fait faillite en 1935 et fut temporairement sauvée par son concurrent Delahaye. Elle connaît actuellement une tentative de renaissance en France.

Les Delage ont été habillées par les plus grands carrossiers de l'époque et ont remporté de nombreux trophées dans les concours d'élégance, comme ce cabriolet De Villars présenté pour la première fois au Concours de l'Auto de Printemps en 1938 où il remporta le Grand Prix.

De Villars avait été lancé en 1925 par Frank Jay Gould, un riche Américain qui vivait en France et qui décida de créer une petite carrosserie répondant aux besoins de ses riches amis. Elle fut baptisée d'après le nom de famille de son gendre, qui était également responsable de l'entreprise. La production était limitée et s'est arrêtée après la Seconde Guerre mondiale.

Notre troisième nominé - et un autre exemple du talent des carrossiers français - est cette Bugatti Type 57S cabriolet surbaissé de Vanvooren de 1937, appartenant à Andrew Pisker de Monaco. Il a remporté le Best of Show au Concorso d'Eleganza Villa d'Este.

La Type 57 est une voiture de grand tourisme construite de 1934 à 1940. Il s'agit d'un modèle entièrement nouveau créé par Jean Bugatti, le fils prometteur du fondateur Ettore - et l'avenir de la marque aurait certainement été différent si Jean n'avait pas été tragiquement tué dans un accident de la route en 1939, âgé de 30 ans seulement.

Vanvooren, le carrossier, était passé des voitures à cheval du XIXe siècle au marché des voitures de luxe dans les années 1930, combinant des standards de qualité élevés avec une élégance conservatrice, plus sobre que les conceptions spectaculaires de Jean Bugatti telles que l'Atlantic.

Notre cabriolet, l'un des trois ou quatre qui arborent ce dessin, s'est retrouvé en Amérique dans les années 1950. Propriété de Charles Chayne, vice-président de l'ingénierie chez General Motors, il devint un châssis d'essai pour un nouveau moteur V8 en aluminium et une boîte de vitesses automatique, imaginez ! Elle est aujourd'hui à nouveau telle qu'elle était à sa sortie d'usine.

Alors que la France avait Bugatti, Delage, Hispano Suiza, l'Amérique avait Duesenberg.

Ce modèle J de 1932 avec carrosserie torpédo française de Figoni, appartenant à Lee Anderson de Floride, a remporté le Best of Show au Pebble Beach Concours d'Elegance.

Les frères Duesenberg avaient commencé à construire des voitures de course avec un succès considérable juste avant la Première Guerre mondiale et ont ensuite rejoint l'empire Cord avant que le modèle J ne soit lancé. Introduite au salon de l'automobile de New York en 1928, la Model J avait l'ambition de n'être rien de moins que la meilleure voiture américaine de tous les temps.

Joseph Figoni est peut-être le carrossier français le plus renommé de l'époque. Né Giuseppe en 1894 en Italie, il s'installa à Paris avec ses parents dès son plus jeune âge. Giuseppe devint alors Joseph. Il créa sa société en 1923 - il y a 100 ans, un autre anniversaire à chiffre rond !, s’associant plus tard avec Ovidio Falaschi.

Cet exemplaire, connu sous le nom de "Speedster Français", avait été expédié en tant que châssis nu au distributeur européen de la société à Paris. Une fois équipé de sa carrosserie, il fut présenté au Concours d'Elégance de Cannes où il remporta le Grand Prix. Il connut une vie mouvementée jusqu'à ce que son propriétaire actuel parvienne à en réunir les composants qui avaient été séparés au fil des ans.

Cette vue inhabituelle du dessus illustre les proportions parfaites de la voiture, avec le pare-brise au milieu de l'empattement. La grandeur classique !

Notre cinquième nominée est une autre Duesenberg, cette fois avec une carrosserie américaine. Best of Show à The Amelia, cette La LaGrande Convertible Coupé Model J de Walker de 1934 appartient à Harry Yeaggy de l'Ohio.

La plupart des J ont été carrossées selon les désirs de leurs clients par ce que l'Amérique et l'Europe avaient de mieux à offrir. En Amérique, il s'agissait de Murphy, LeBaron, Rollston et similaires. Cependant, Duesenberg avait également développé une ligne interne de carrosseries conçues par des stylistes talentueux tels que Gordon Buehrig et Al Leamy. Exécutés sous le nom de LaGrande, les modèles exclusifs de Duesenberg étaient réalisés par plusieurs carrossiers et livrés à l'usine Duesenberg où ils étaient assemblés et garnis.

Cet exemplaire est l'un des trois construits par Albert Walker et fut d’abord acheté par Marjorie Merriweather Post, femme d'affaires, mondaine, philanthrope, collectionneuse de beaux-arts et, accessoirement, la femme la plus riche du monde.

Passons maintenant aux candidats de l'après-guerre.

Je dirais que celle qui se rapproche le plus des goûts des Futuristes, une voiture de course avec, pour reprendre leurs termes : "son compartiment moteur orné de gros tuyaux comme des serpents à l'haleine explosive...", est cette Jaguar Type D de 1956 appartenant à Bill Pope de l'Arizona et Best of Show à The Quail, A Motorsports Gathering, ici même.

Conçue spécialement pour gagner les 24 Heures du Mans, ce qu'elle fit en 1955, 56 et 57, la D présentait une construction monocoque innovante et des courbes effilées dessinées par l'ingénieur maison Malcolm Sayer. Elle intégrait des technologies aéronautiques et arborait une dérive stabilisatrice verticale distinctive qui est toujours une caractéristique de la plupart des voitures actuelles au Mans. Celle-ci passa sa vie aux États-Unis et a fait l'objet d'un article dans Road & Track, The Motoring Enthusiast’s Magazine, la bible de nombreux passionnés de ma génération.

Une soirée Best of the Best ne serait pas complète sans au moins une Ferrari. Ce soir, nous en avons deux !

La première est un autre candidat récurrent - déjà nominé en 2018 - et j'ai été un moment tenté de me rendre à nouveau sur ChatGPT mais, après les "fake news" à propos de la Dubonnet Xenia, je me suis abstenu.

Cette Ferrari 250 GT Coupé par Zagato de 1956 a remporté dernièrement le Best of Show à Salon Privé en Angleterre. Elle appartient à David et Ginny Sydorick de Beverly Hills en Californie qui, comme les Mullin, sont des habitués et ont déjà remporté le BoB avec leur Alfa Romeo 8C 2900. Nous avons ici un autre candidat sérieux de leur écurie.

La relation entre Ferrari et Zagato fut un "mariage" de courte durée mais remarquable en matière de design automobile, associant le châssis et le moteur Ferrari déjà éprouvés à la carrosserie à faible traînée de Zagato avec son toit à "double bulle" si caractéristique.

Zagato était connu pour utiliser des techniques légères qu'il avait adoptées depuis la création de sa société en 1919. Ainsi, la carrosserie de la 250 GTZ était non seulement esthétique - elle fut présentée à l'époque au Concorso d'Eleganza di Cortina d'Ampezzo et au Concorso d'Eleganza di Campione d'Italia -, mais elle remporta également deux fois le Championnat Italien des Voitures de Sport.

Enfin, notre huitième nominée est cette Ferrari 365 P Berlinetta Speciale "Tre Posti" de 1966, avec une carrosserie réalisée par Pininfarina qui était le carrossier préféré de Ferrari jusqu'à ce que cette dernière lance son propre studio. La voiture appartient à Roberto Quiroz, du Mexique. Elle a remporté le Best of Show au Cavallino Classic à Palm Beach.

Présentée en octobre 1966 au salon de l'automobile de Paris sur le stand de Pininfarina, et sœur d'une voiture similaire construite pour Gianni Agnelli, elle fut ensuite exposée dans les salons automobiles du monde entier en 1966 et 1967.

Les voitures de course les plus performantes de l'époque avaient vu leur moteur déplacé de l'avant vers le centre arrière. Cette disposition incita les constructeurs automobiles à produire des voitures de route avec la même configuration, ce qui en modifia le design. Pininfarina releva le défi, à l'encontre des convictions de M. Ferrari, qui avait déclaré : "Les chevaux tirent la charrette, ils ne la poussent pas". La Berlinetta Tre Posti eut une profonde influence sur la production future de la marque.

Sa caractéristique la plus inhabituelle était les "Tre Posti", les trois sièges, avec celui du conducteur au centre et les deux autres légèrement décalés, une disposition qui n'était pas sans risque, comme l'a rapidement compris et illustré le caricaturiste britannique Russell Brockbank.

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Voilà ! Présentées dans l'ordre chronologique sur cette image, vous voyez les huit nominées de cette édition du Peninsula Classics Best of the Best Award.

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Avant de vous quitter, un grand merci aux propriétaires, aux curateurs et aux artisans qui restaurent, entretiennent, montrent et partagent de tels trésors, tous des exemples fascinants, significatifs et désirables de voitures saluées par les Futuristes !

Nous vous souhaitons de nombreuses autres célébrations de ce type et, selon la devise de notre ami et collègue membre fondateur Bruce Meyer : "Ne levez jamais le pied !

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(CHRISTIAN PHILIPPSEN)

13 Août 2023